Immobilier durable : le COTEE éclaire et challenge la stratégie du groupe La Poste
Le secteur du bâtiment joue un rôle clé dans la transition écologique. Il compte pour 44% dans la consommation énergétique finale en France et 23% des émissions de GES (gaz à effet-de-serre).
Le parc immobilier de La Poste est unique par son volume, son implantation au cœur des territoires et sa diversité.
La Poste détient un patrimoine immobilier unique de 6 millions de m² et 10 000 bâtiments, avec des biens de petite taille, comme les bureaux de poste, mais aussi des entrepôts pouvant aller jusqu’à 35 000 m2. Ce patrimoine a été constitué au fil du temps, entre 1880/1920 et les Trente Glorieuses. La nature de cet héritage fait qu’aujourd’hui la moitié de notre empreinte énergétique est liée à notre parc immobilier.
Pour adapter sa politique immobilière en matière de transition écologique, le Groupe agit par le biais de sa foncière, La Poste Immobilier, qui gère, adapte, optimise et valorise ce parc immobilier. L’enjeu est de massifier les actions pour répondre au défi d’échelle inhérent à la taille et la capillarité du parc immobilier postal.
La Poste Immobilier s’interroge aujourd’hui sur la façon de prendre en compte, de façon impactante, les sujets de biodiversité, de réduction de l’artificialisation des sols au sens du ZAN (1) ou encore de conception écologique des plateformes logistiques. Autant de problématiques soumises aux experts du COTEE.
Une question essentielle est comment concilier le développement de notre activité dans le domaine du colis, compte-tenu de l’essor du e-commerce, et la réduction de l’impact sur l’environnement, en particulier sur la biodiversité et l’artificialisation.
Tendre vers un impact positif en termes de biodiversité
Dans son dernier rapport, le GIEC (2) pose la question de la ville et de la durabilité de l'habitat. Les solutions basées sur la nature sont mises en avant pour lutter contre les effets de surchauffes urbaines.
Il faut inscrire la biodiversité dans une vision globale de la ville verte et résiliente. Selon un classement international, Paris arrive en 35è position en termes de résilience car le sujet des îlots de chaleur n’a pas été suffisamment pris en considération. En tant qu'acteur de l'immobilier, La Poste est forcément un acteur de la ville verte.
Ainsi, la question de la biodiversité doit être abordée dans une approche systémique y compris sous l’angle de l’intégration paysagère des bâtiments et des plateformes.
Il faut également que les actions s’inscrivent dans un récit vecteur d’adhésion, le risque étant sinon de « gadgétiser » le sujet. Il y a en particulier un enjeu de pédagogie. Ainsi la mise en place d’actions, comme l’implantation de mini-forêts sur les sites, comme le fait La Poste, doit être l’occasion de faire un travail d’appropriation sur ces sujets.
La biodiversité est un sujet éminemment compliqué qui renvoie à l’acceptabilité sociale des usagers.
Le défi reste d’embarquer les femmes et les hommes dans nos actions. La tâche est facile auprès des chefs de projet, qui suivent un cahier des charges. C’est tout le reste qu’il faut porter comme une politique managériale.
Nos ancêtres avaient raison : le meilleur moyen d’éviter les ilots de chaleur urbains, c'est de planter des arbres !
Faire de cette démarche un récit est clé. Vous avez les atouts pour impulser une dynamique qui pourra ensuite embarquer.
De l’avis de plusieurs experts, il faut en outre relier ce discours à la stratégie urbanistique et immobilière qui est celle du Groupe, notamment dans la transformation de son immobilier. A l’occasion d’opérations de réhabilitation, le Groupe s’attache en effet à faire du "recyclage urbain" et recréer des lieux de centralité, pour revivifier les villes, dans une approche environnementale et de mixité (sociale, fonctionnelle).
Concilier développement de l’activité et réduction de l’artificialisation au sens du « ZAN »
Privilégier la densité, développer la sobriété foncière et la verticalité, désartificialiser (ex. en juchant les parkings sur les toits), reconvertir des sites existants, etc. autant d’outils mobilisés par La Poste Immobilier pour contribuer à l’objectif "ZAN", mais qui ne s’avèrent pas toujours conciliables avec les contraintes opérationnelles et la dynamique de croissance à court terme du colis.
Dans l’optique du ZAN, on peut s’interroger sur la réutilisation des bureaux de poste qui ne sont plus exploités. Ils pourraient être utilisés pour densifier les villes sans endommager l’espace naturel.
Sur ce point, les experts du COTEE concèdent que "personne ne sait vraiment aujourd’hui comment atteindre cet objectif ZAN". La réponse serait-elle dans la promotion de modèles centrés sur la consommation locale et un (e-)commerce de proximité ?
Par ailleurs, les experts insistent sur l’importance de systématiser l’approche paysagère de la densification urbaine. En cela, l’exemple du projet de reconversion du centre de tri de Mérignac mené par La Poste Immobilier, avec, en cible, ses 1 500m2 de forêt urbaine, est emblématique.
La reconversion d’anciens bâtiments postaux en logements ou en Résidences Services Séniors sont ainsi autant de contributions positives à l’objectif ZAN des villes. L’exemple de l’immeuble de Magenta, qui était à la fois un bureau de poste et un centre de tri, illustre bien cette logique. Il propose désormais 50 % de logements sociaux et 50 % de logements libres, des espaces de coworking, un bureau de poste et des espaces de logistique urbaine. Des jardins ont aussi été implantés sur le toit.

Repenser la conception écologique des plateformes
La Poste Immobilier mène aujourd’hui un projet pilote particulièrement exemplaire dans le cadre de la reconversion de la plateforme de Lézennes, près de Lille.

75% de valorisation matière, emploi massif de matériaux biosourcés, recours à des fournisseurs locaux, bâtiment passif, alimenté à 100% par des énergies renouvelables, cahier des charges strict en matière de biodiversité, parkings en toiture et test de tri en hauteur pour limiter l’emprise au sol, etc.
Plus généralement, l’implantation de nouvelles plateformes s’accompagne systématiquement de la création d’espaces verts.
Selon les experts du COTEE, le temps long du cycle immobilier doit surtout être mis en regard des ambitions à 2050. Le cycle de rénovation énergétique des bâtiments pose ainsi la question d’atteindre l’objectif de neutralité carbone à cet horizon.
Au-delà de l’objectif de réduire les émissions en 2030, l’objectif final est de les ramener à zéro en 2050. Il faut séquencer les actions et peut-être envisager de mener des opérations de façon anticipée, même si cela ne fait pas sens économiquement à court terme.
La Poste confirme être déjà dans cette démarche, car il n’y a plus un euro d’investissement qui ne passe au crible de la neutralité carbone.
La question est aujourd’hui de fixer le bon niveau de performance dans nos prochains chantiers pour atteindre la cible à 2050 et ne pas gâcher le gisement d’économie d’énergie.
Par ailleurs, La Poste Immobilier réfléchit à enrichir la programmation des usages des plateformes. Ainsi, certains hôtels de logistique urbaine, comme le HLU de Lyon, s’intègrent dans des ensembles mixtes avec des petites activités. Est également à l’étude l’implantation de stations GNV (3) ou multi-énergies ouvertes aux tiers, ou encore, offrant de l’autoconsommation photovoltaïque collective avec un ensemble de logements à proximité

Ces exemples mettent en lumière la capacité de futurs projets logistiques, au-delà de leur propre vocation "d’usine postale", à offrir des services au territoire.
(1): L’atteinte d’un objectif de "zéro artificialisation nette" (ZAN) à 2050 est ainsi un des enjeux clés de la loi Climat et Résilience de 2021.
(2): Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat (GIEC).
(3): Gaz naturel pour véhicules.